C-37.4 - Loi autorisant la communication de renseignements personnels aux familles d’enfants autochtones disparus ou décédés à la suite d’une admission en établissement

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À jour au 20 février 2024
Ce document a valeur officielle.
chapitre C-37.4
Loi autorisant la communication de renseignements personnels aux familles d’enfants autochtones disparus ou décédés à la suite d’une admission en établissement
CONSIDÉRANT que les circonstances ayant entouré des cas de disparitions ou de décès d’enfants autochtones à la suite de leur admission en établissement de santé et de services sociaux du Québec, à l’occasion de leur prise en charge pour des raisons de santé ou au terme d’évacuations sans la présence de leurs parents, demeurent inconnues de leurs familles;
CONSIDÉRANT que l’Assemblée nationale reconnaît la souffrance causée par la disparition ou le décès d’un enfant;
CONSIDÉRANT que l’Assemblée nationale souhaite mettre en place une réponse pour soutenir les familles autochtones dans leur quête de vérité par la recherche de renseignements sur les circonstances ayant entouré la disparition ou le décès d’un enfant autochtone ainsi que dans leur processus de guérison et s’engager sur la voie de la réconciliation;
CONSIDÉRANT que l’Assemblée nationale souhaite travailler dans un esprit de collaboration avec les Autochtones, en tenant compte notamment de leurs particularités linguistiques et culturelles, et entretenir la mémoire collective des Québécois;
LE PARLEMENT DU QUÉBEC DÉCRÈTE CE QUI SUIT :
CHAPITRE I
DISPOSITIONS INTRODUCTIVES
2021, c. 16, c. I.
1. La présente loi a pour objet de soutenir les familles d’enfants autochtones disparus ou décédés dans leurs recherches de renseignements auprès d’un établissement, d’un organisme ou d’une congrégation religieuse sur les circonstances ayant entouré la disparition ou le décès de ces enfants à la suite d’une admission en établissement, en tenant compte notamment des particularités linguistiques et culturelles de ces familles et de leurs besoins psychologiques et spirituels. À cette fin, elle prévoit notamment que le ministre responsable des affaires autochtones, dans un esprit de collaboration, assiste les familles qui le requièrent.
2021, c. 16, a. 1.
2. Pour l’application de la présente loi, on entend par:
1°  «établissement», selon le contexte, un établissement de santé et de services sociaux au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2), le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James institué en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5) ou tout lieu régi par la loi où étaient offerts des services de santé ou de services sociaux avant le 31 décembre 1992;
2°  «enfant» une personne mineure au moment de son admission en établissement;
3°  «organisme» un ministère, un organisme gouvernemental, un organisme municipal ou un organisme scolaire au sens de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1);
4°  «congrégation religieuse» un ensemble de religieux faisant partie d’une communauté religieuse.
De plus, pour l’application de la présente loi, toute congrégation religieuse est assujettie à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (chapitre P-39.1).
De même, la notion d’admission en établissement vise les enfants admis ou inscrits dans un centre hospitalier, un centre de protection de l’enfance et de la jeunesse ou un centre de réadaptation exploité par un établissement, ou dans ce qui tenait lieu de tels centres, ainsi que les enfants pris en charge par une famille d’accueil.
2021, c. 16, a. 2.
3. Le ministre responsable des affaires autochtones informe régulièrement les familles autochtones, en tenant compte notamment de leurs particularités linguistiques et culturelles, des différentes mesures mises en place pour les soutenir dans leurs recherches de renseignements, notamment quant à la procédure à suivre conformément à la présente loi.
2021, c. 16, a. 3.
CHAPITRE II
COMMUNICATION DE RENSEIGNEMENTS PERSONNELS DÉTENUS PAR UN ÉTABLISSEMENT, UN ORGANISME OU UNE CONGRÉGATION RELIGIEUSE ET QUI CONCERNENT UNE PERSONNE QUI POURRAIT ÊTRE UN ENFANT AUTOCHTONE DISPARU OU DÉCÉDÉ
2021, c. 16, c. II.
4. Le ministre responsable des affaires autochtones prête assistance à toute personne qui le requiert, selon les besoins de cette personne, pour la formulation d’une demande visant la communication de renseignements personnels détenus par un établissement, par un organisme ou par une congrégation religieuse et qui concernent une personne qui pourrait être un enfant autochtone disparu ou décédé, ainsi que pour le suivi de cette demande, notamment en prévoyant une rencontre si la personne qui formule la demande le juge nécessaire.
Lorsqu’il prête assistance à une personne en application du premier alinéa, le ministre peut aussi prêter assistance à tout responsable de l’accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels d’un établissement ou d’un organisme ou à toute personne faisant partie d’une congrégation religieuse qui le requiert dans le cadre du traitement de la demande. Le ministre et le responsable de l’accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels d’un établissement ou d’un organisme ou la personne faisant partie d’une congrégation religieuse peuvent également se communiquer tout renseignement personnel nécessaire au traitement de la demande.
2021, c. 16, a. 4.
5. La personne qui respecte les conditions suivantes peut demander la communication de renseignements personnels détenus par un établissement, par un organisme ou par une congrégation religieuse et qui concernent une personne qui pourrait être un enfant autochtone disparu ou décédé:
1°  transmettre sa demande au plus tard le 1er septembre 2031;
2°  être un membre de la famille de l’enfant visé par la demande;
3°  disposer de renseignements susceptibles de laisser croire que cet enfant a été admis, avant le 31 décembre 1992, en établissement;
4°  faire état de circonstances qui suggèrent que cet enfant est disparu ou est décédé, avant le 31 décembre 1992, alors qu’il était admis en établissement.
Pour l’application du paragraphe 2° du premier alinéa, est un membre de la famille de l’enfant son arrière-grand-père ou son arrière-grand-mère, son grand-père ou sa grand-mère, son père ou sa mère, son frère ou sa soeur, son oncle ou sa tante, son cousin ou sa cousine, son beau-père ou sa belle-mère, son beau-frère ou sa belle-soeur, son enfant, son neveu ou sa nièce ou toute autre personne significative.
S’il l’estime nécessaire, le gouvernement peut, avant la date limite de transmission des demandes visant la communication de renseignements personnels, reporter cette date d’une période maximale de deux ans. Il peut effectuer d’autres reports aux mêmes conditions.
2021, c. 16, a. 5.
6. En réponse à une demande visant la communication de renseignements personnels, seuls sont communiqués au demandeur les renseignements personnels susceptibles de faire connaître les circonstances ayant entouré la disparition ou le décès de l’enfant, y compris ceux portant sur des faits postérieurs au 31 décembre 1992, tels les renseignements concernant son transfert vers un autre établissement et, le cas échéant, le fait qu’il a été adopté.
S’il est raisonnable de croire que la personne qui pourrait être un enfant autochtone disparu ou décédé est toujours vivante à la lumière des renseignements personnels détenus par un établissement, par un organisme ou par une congrégation religieuse, ceux-ci doivent tenter d’obtenir une confirmation que cette personne est toujours en vie ainsi que les renseignements permettant de la localiser en s’adressant à la Régie de l’assurance maladie du Québec. Sur demande de l’établissement, de l’organisme ou de la congrégation religieuse à cet effet, la Régie lui transmet les noms, date de naissance, sexe, adresse et numéros de téléphone de cette personne inscrite à son fichier d’inscription des personnes assurées ainsi que, le cas échéant, la date de son décès et son adresse au moment du décès.
Les renseignements communiqués pour l’application des premier et deuxième alinéas peuvent notamment provenir d’un dossier ayant trait à l’adoption.
Après réception des renseignements prévus au deuxième alinéa, l’établissement, l’organisme ou la congrégation religieuse traite la demande selon les règles suivantes:
1°  dans le cas où la personne est toujours vivante et qu’elle est localisée, l’établissement, l’organisme ou la congrégation religieuse, après avoir pris contact avec elle, communique les renseignements visés au premier alinéa, sauf si la personne s’y oppose, auquel cas seul est communiqué le fait qu’elle est toujours vivante et, le cas échéant, qu’elle a été adoptée;
2°  dans le cas où la personne est toujours vivante et que l’établissement, l’organisme ou la congrégation religieuse ne parvient pas à la contacter après avoir effectué les démarches nécessaires, sont communiqués les renseignements visés au premier alinéa qui ne portent pas sur des faits postérieurs au 31 décembre 1992 ainsi que le fait qu’elle est toujours vivante;
3°  dans le cas où il n’est pas possible de déterminer que la personne est toujours vivante ou si les vérifications effectuées auprès de la Régie permettent de constater qu’elle est décédée, les renseignements visés au premier alinéa sont communiqués.
Pour l’application du paragraphe 1° du troisième alinéa, l’établissement, l’organisme ou la congrégation religieuse doit informer la personne de son droit de s’opposer à la communication des renseignements, sauf du fait qu’elle est toujours vivante et, le cas échéant, qu’elle a été adoptée.
L’établissement, l’organisme ou la congrégation religieuse peut communiquer au demandeur tout autre renseignement concernant la personne avec le consentement de celle-ci.
2021, c. 16, a. 6.
7. L’établissement, l’organisme ou la congrégation religieuse doit, en cas de refus de communiquer des renseignements personnels visés à l’article 6, motiver ce refus et indiquer la disposition de la présente loi ou d’une autre loi sur laquelle ce refus s’appuie.
2021, c. 16, a. 7.
8. Une personne à qui un établissement ou un organisme refuse de communiquer des renseignements personnels visés à l’article 6 peut faire une demande de révision à la Commission d’accès à l’information, conformément à la section III du chapitre IV de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1).
2021, c. 16, a. 8.
9. Une personne à qui une congrégation religieuse refuse de communiquer des renseignements personnels visés à l’article 6 peut faire une demande d’examen de mésentente à la Commission d’accès à l’information, conformément à la section V de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (chapitre P-39.1).
2021, c. 16, a. 9.
10. Les articles 4 à 6 et 8 de la présente loi s’appliquent malgré les articles 17, 19, 21 à 23 et 27 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) et les articles 7 et 8 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5).
L’article 6 de la présente loi s’applique malgré l’article 63 de la Loi sur l’assurance maladie (chapitre A-29) et l’article 11.2 de la Loi sur la protection de la jeunesse (chapitre P-34.1).
2021, c. 16, a. 10.
11. Les articles 4 à 6 de la présente loi s’appliquent malgré le deuxième alinéa de l’article 83 et le premier alinéa de l’article 94 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1) et malgré le premier alinéa de l’article 27 et le premier alinéa de l’article 30 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (chapitre P-39.1).
2021, c. 16, a. 11.
12. Malgré l’article 97 de la Loi sur les coroners (chapitre C-68.01), le coroner en chef ou un coroner à temps plein peut permettre la consultation d’un rapport non modifié ou des documents qui y sont annexés ou, après le paiement des droits fixés par le Tarif des droits et indemnités applicables en vertu de la Loi sur les coroners (chapitre C-68.01, r. 5), en transmettre des copies certifiées conformes à une personne qui satisfait aux conditions de l’article 5 de la présente loi, s’il estime qu’ils sont susceptibles de faire connaître les circonstances ayant entouré la disparition ou le décès d’un enfant autochtone.
2021, c. 16, a. 12; 2020, c. 20, a. 44 et 45.
CHAPITRE III
POUVOIRS D’ENQUÊTE
2021, c. 16, c. III.
13. Lorsqu’un ou des éléments laissent croire que des renseignements susceptibles de faire connaître les circonstances ayant entouré la disparition ou le décès d’un enfant autochtone existent, mais n’ont pas pu être communiqués à une personne en application de la présente loi, le ministre peut, d’office ou sur demande de cette personne, après avoir considéré les démarches effectuées par la personne, faire enquête auprès d’un établissement, d’un organisme ou d’une congrégation religieuse.
2021, c. 16, a. 13.
14. Pour la conduite d’une enquête en vertu de l’article 13, le ministre ou la personne qu’il désigne sont investis des pouvoirs et de l’immunité des commissaires nommés en vertu de la Loi sur les commissions d’enquête (chapitre C-37), sauf du pouvoir d’ordonner l’emprisonnement.
2021, c. 16, a. 14.
15. Le ministre ou la personne qu’il désigne peut, afin qu’une personne se présente devant lui, utiliser un moyen technologique, lorsque cette personne peut ainsi être jointe.
2021, c. 16, a. 15.
16. Le ministre ou la personne qu’il désigne doit, sur demande, s’identifier et, pour la personne désignée par le ministre, exhiber le certificat signé par le ministre attestant sa qualité.
2021, c. 16, a. 16.
17. Le ministre ou la personne qu’il désigne doit, à la fin de l’enquête, consigner le résultat de l’enquête et la preuve recueillie dans un rapport.
Dans le respect des règles prévues à l’article 6 et en tenant compte des adaptations nécessaires, sont communiqués à la personne concernée le résultat de l’enquête et la preuve appropriée recueillie.
2021, c. 16, a. 17.
CHAPITRE IV
EXHUMATION
2021, c. 16, c. IV.
18. Le ministre peut assister les familles d’enfants autochtones disparus ou décédés dans leurs démarches entourant une demande à la Cour supérieure afin qu’elle ordonne l’exhumation. Le ministre avise dès que possible le coroner en chef de l’existence de telles démarches.
2021, c. 16, a. 18.
CHAPITRE V
PLAINTES
2021, c. 16, c. V.
19. Une personne peut, en cas d’insatisfaction quant aux services reçus lors de ses recherches de renseignements auprès d’un établissement, d’un organisme ou d’une congrégation religieuse, porter plainte au ministre responsable des affaires autochtones.
Le ministre effectue alors des démarches auprès de l’établissement, de l’organisme ou de la congrégation religieuse visé par la plainte afin de comprendre et d’améliorer les pratiques, notamment par la sensibilisation des personnes concernées aux réalités autochtones.
2021, c. 16, a. 19.
20. Le dépôt d’une plainte au ministre s’effectue conformément à la procédure qu’il établit. Cette procédure doit notamment:
1°  préciser les modalités relatives au dépôt d’une plainte et à son traitement;
2°  indiquer les renseignements qu’elle doit comprendre;
3°  permettre au plaignant et au dirigeant de l’établissement, de l’organisme ou de la congrégation religieuse visé par la plainte de présenter leurs observations.
Le ministre diffuse cette procédure, notamment sur son site Internet.
2021, c. 16, a. 20.
CHAPITRE VI
DISPOSITIONS FINALES
2021, c. 16, c. VI.
21. Le ministre crée un comité de suivi composé de représentants de différents groupes ou de personnes pour l’application de la loi, afin de contribuer à l’amélioration des services offerts aux familles d’enfants autochtones disparus ou décédés, notamment en matière de plaintes et concernant l’état d’avancement du traitement des demandes.
2021, c. 16, a. 21.
22. Le ministre responsable des affaires autochtones rend compte au gouvernement de l’application de la présente loi dans un rapport annuel au plus tard le 31 mars 2022 et, par la suite, au plus tard le 31 mars de chaque année.
Ce rapport fait notamment état du nombre de plaintes formulées en application du premier alinéa de l’article 19 et de leur nature, des améliorations apportées aux pratiques ainsi que des mesures de sensibilisation utilisées, le cas échéant. Il fait également état du nombre de demandes reçues et du nombre d’enquêtes effectuées en application de la loi, ainsi que de leur nature, de leur état d’avancement et du nombre d’enfants concernés. Il comprend aussi la liste des personnes qui composent le comité de suivi créé en vertu de l’article 21 et énonce les recommandations formulées par ce dernier.
Le rapport est déposé par le ministre devant l’Assemblée nationale dans les 30 jours de sa production au gouvernement ou, si elle ne siège pas, dans les 30 jours de la reprise des travaux. Il est également publié, à cette occasion, sur le site Internet du ministère.
Le rapport est, en outre, présenté au comité de suivi et aux communautés autochtones concernées. Les modalités de présentation de ce rapport seront établies avec le comité de suivi.
2021, c. 16, a. 22.
23. Les dispositions de la présente loi cessent d’avoir effet dès que la date limite pour transmettre une demande de communication de renseignements en vertu de l’article 5 est atteinte et que le traitement des demandes est complété.
2021, c. 16, a. 23.
24. Le ministre responsable des affaires autochtones est responsable de l’application de la présente loi.
2021, c. 16, a. 24.
25. (Omis).
2021, c. 16, a. 25.